Le 26 février 2024, Hazar Zilelioglu, titulaire d’un master en biologie et en neurosciences et notre deuxième doctorant de Robotics by Design Lab, a soutenu sa thèse de doctorat en informatique, spécialité IA dans le cadre de l’école doctorale de l’Université Paris-Est Créteil (UPEC) et co-direction avec Strate Ecole de Design. La thèse s’intitule «Towards Assisting the Older Adult-Companion Animal Relationship: A Focus on Activity Recognition through Generative Deep Learning» (en français Vers l’assistance de la relation personne âgée – animal de compagnie: Focalisation sur la reconnaissance d’activités par apprentissage profond génératif). La thèse a été soutenue après 3 ans et quelques mois de sa date de démarrage. La soutenance a eu lieu à Strate.
Cette thèse a été d’une grande pluridisciplinarité. Hazar, titulaire d’un master en biologie et en neurosciences, a été encadré par deux tuteurs industriels, Clément BATAILLE de frog en design et Solène Le Bars de Capgemini en neurosciences et technologies pour la santé, avec l’aide de BNP Paribas Cardif, qui a été le “sponsor expérimental” de cette thèse CIFRE, dans le cadre de son Lab d’innovation (Cardif’Lab – voir plus dans notre Épisode 4 du RbD Lab, le documentaire).
Ensuite, le suivi académique a été pris en charge par le laboratoire LISSI de l’Université Paris-Est Créteil (UPEC) et Strate Research sous la direction de Yacine Amirat, en co-direction avec Abdelghani Chibani, Ghazaleh Khobadandelou (LISSI) et Ioana Ocnarescu (Strate). Le jury de la soutenance, en plus de l’équipe encadrante, a été composé de :
- Président : Prof. Mohamed Chetouani, Sorbonne University, France
- Rapporteure : Prof. Adriana Tapus, Polytechnic Institute of Paris, France
- Rapporteur : Prof. Hichem Maaref, Paris-Saclay University, France
- Examinateur : Prof. Mounîm A. El Yacoubi, Institut Mines-Telecom/ Telecom SudParis / Institut Polytechnique de Paris

Le contexte de la thèse est lié aux implications du vieillissement sur la possession d’animaux de compagnie. En France, environ une personne sur deux possède un animal de compagnie. Cette tendance s’explique par les nombreux avantages liés à la possession d’un animal, tels que le soutien émotionnel, la compagnie et même des avantages physiques comme la réduction du stress et l’encouragement à l’exercice physique. Cependant, le vieillissement de la population peut poser des défis pour la préservation de la relation entre l’humain et l’animal. Avec l’âge, les propriétaires peuvent rencontrer des difficultés à s’occuper de leurs animaux de compagnie, que ce soit en raison de problèmes de santé, de limitations physiques ou de contraintes financières.
🐶 🧓🏻 Relation entre les personnes âgées et leur animal de compagnie – quels besoins ? quels usages ? une première exploration terrain
Le taux de possession des animaux diminue de manière significative avec l’âge. À partir de 65 ans, le taux de possession diminue de 50% à chaque décennie, ce qui soulève des questions sur les obstacles rencontrés par les personnes âgées pour maintenir une relation étroite avec leurs compagnons. Ces constants sont au cœur de cette recherche qui vise à trouver des moyens pour soutenir les seniors dans le maintien de leur relation avec leurs animaux de compagnie.
Dans un premier temps, afin de comprendre les besoins des personnes possédant des animaux de compagnie, Hazar a mené des 11 études qualitatives, comprenant des entretiens semi-directifs avec des propriétaires de chiens. Ces entretiens ont révélé des défis liés à la cohabitation, ainsi que des contraintes et des inquiétudes concernant le bien-être de l’animal.
Ces données ont ensuite été explorées lors d’un atelier d’idéation visant à générer des scénarios capables de relever ces défis. Quatre scénarios clés ont été identifiés : Interaction, Dressage, Balade, Repas. Ces derniers sont basés sur des tâches journalières nécessaires au bien-être de l’animal et qui demandent un certain effort physique et mental de la part du maître. Ils peuvent donc être pertinents pour les individus qui sont en situation d’une capacité physique et mentale réduite. En plus, ils mettent en évidence les bénéfices potentiels des services et le besoin correspondant de développement technologique pour les mettre en œuvre. Pour évaluer ces quatre scénarios, Hazar a consulté un gériatre, un expert en comportement canin et un designer, qui ont tous recommandé de se concentrer sur un scénario d’interaction axé sur la prévoyance et la réassurance, ce qui peut permettre d’agir de manière proactive et donc d’identifier et de répondre aux difficultés avant qu’il ne soit trop tard.

🥼 🐕 Une deuxième rencontre avec le terrain, étude in-situ sur 10 personnes et leurs chiens de compagnie
Dans le contexte de la prévoyance, la reconnaissance des activités des animaux de compagnie est devenue un domaine d’étude crucial. La thèse a soulevé plusieurs problématiques notamment le manque de bases de données sur les activités des animaux de compagnie et la façon dont ces données peuvent fournir des informations sur le bien-être des propriétaires. Pour répondre à ces questions, des expérimentations ont été menées avec 10 participants et de leurs chiens de compagnie, enregistrant leurs activités et rythmes biologiques sur une période de 5 jours. À cette fin, plusieurs outils ont été développés et prototypés :
- une centrale inertielle a été utilisée sur un collier pour mesurer les mouvements des chiens et analyser leurs activités et comportements, ainsi que leurs rythmes biologiques.
- Les participants ont pu annoter les activités de leurs chiens grâce à une application Android développée par Hazar et l’équipe de recherche à cet effet.
En plus de l’enregistrement des données sur les activités et le rythme animal, l’équipe de recherche a également mis en place des questionnaires démographiques et des entretiens journaliers avec les participants pour le suivi précis de l’expérimentation.
Les résultats ont confirmé que les rythmes d’activité des animaux de compagnie sont étroitement liés à ceux de leurs propriétaires, mettant en lumière l’importance de cette relation dans la vie quotidienne. De plus, ces résultats ont identifié des schémas d’activité rythmique chez les animaux de compagnie, qui sont cohérents avec d’autres études récemment publiées. Par ailleurs, une corrélation significative a été observée entre le bien-être auto-déclaré du propriétaire et l’activité de l’animal. Ce qui est particulièrement intéressant à souligner, c’est qu’une technologie avancée n’est pas nécessaire pour contribuer à la prévoyance et à la préservation de la relation entre les personnes âgées et leurs chiens de compagnie. Des technologies plus simples peuvent également être efficaces pour détecter d’éventuels déséquilibres dans la relation entre les seniors et leurs animaux de compagnie.
Enfin, il est important de noter que ces données présentent certaines limitations, notamment en termes de taille relativement réduite, d’hétérogénéité et de déséquilibre dans leur répartition. Nous avons également rencontré des difficultés pour trouver des seniors volontaires pour cette expérimentation, ce qui signifie que les 10 participants n’ont pas tous rempli la contrainte d’âge.

✨ Étude 3 de la thèse, une approche basée sur l’apprentissage profond qui permet de répondre au défi du manque de données ✨
Pour essayer de répondre aux limites de cette expérimentation le principal défi réside dans la disponibilité limitée de données suffisamment étiquetées pour l’entraînement des modèles. Pour cela Hazar s’est fixé pour objectif de développer une approche reposant sur l’apprentissage profond. Les résultats de ses travaux ont été très prometteurs :
- Le modèle qu’il a élaboré a atteint des performances de classification satisfaisantes, surpassant même celles des modèles supervisés classiques basés sur les réseaux de neurones convolutifs (CNN).
- Les performances obtenues ont dépassé celles des études précédentes dans le domaine.
- De plus, l’algorithme qu’il a proposé s’est avéré robuste et adaptable à différentes bases de données, offrant ainsi une solution flexible et efficace pour la reconnaissance d’activités.
Au final, ces travaux ont offert une nouvelle perspective sur le maintien de la relation entre la personne âgée et son animal de compagnie grâce à la technologie. Ils ont combiné plusieurs disciplines telles que le design, la biologie et l’intelligence artificielle pour explorer cette relation et offrir une approche complète.
